Du sommet des montagnes aux petites profondeurs des mers et des lacs, il me prend parfois comme une irrépressible envie de verticalité. En escalade ou en apnée. Avez-vous déjà ressenti cette attraction? Un sommet qui pointe le bout de son nez à l’horizon, et déjà, on s’imagine là-haut. Une flaque aux eaux turquoises apparait, et déjà, nous immergeons notre imaginaire. Nous sommes plus d’un passionné à nous élever vers les cimes ou à plonger vers un univers plus doux en apparence, mais pas moins hostile. Alors je me demande : d’où nous vient cet attrait pour la verticalité?
L'amour du mouvement
S’il fallait trouver un point commun entre un apnéiste et un grimpeur, je dirais avant tout : l’amour du geste. L’un danse sur le caillou, l’autre entame un ballet aquatique. Tous deux aiment la fluidité, le geste précis, technique, le mouvement.
L’apnéiste réfractaire à cette agitation peut imaginer se réfugier dans l’apnée statique. C’est sans compter sur la préparation du corps à cette épreuve : la quête d’un diaphragme souple et d’un corps relâché ne se fait pas en restant de marbre. Il découvre avec stupeur que le mouvement n’est pas que physique. La tête immergée dans l’eau, il voit son mental se tortiller, se démener pour oublier pendant quelques minutes qu’il ne respire pas.
Le grimpeur, lui aussi, est toujours en mouvement. Le plus souvent avide d’action, il a l’impression de se figer lorsqu’il assure son camarade de cordée. Mais là aussi, loin d’être inactif, il grimpe mentalement avec son compagnon pour lui donner du mou au bon moment, ou réceptionner une éventuelle chute. Et puis, il trépigne d’impatience pour à son tour s’élever.
La nature
L’adepte de verticalité est, la plupart du temps, un amoureux de la nature. Passionné de son milieu il apprend à différencier le chamois du bouquetin, à citer les sommets qu’il escalade, vus de loin, ou à distinguer le granite du quartzite. La contemplation est son mot d’ordre. Avant de se mettre à l’eau, il admire l’horizon avant de former un angle droit avec lui et de découvrir cet autre monde où tout est plus fluide. Alors, sur le caillou ou dans l’eau, il explore et admire. La petite fleur qui pousse dans une petite lunule, le mérou qui s’aventure en dehors de sa grotte.
L’apnéiste et le montagnard ont en commun cette responsabilité de s’amuser dans un milieu naturel fragile qu’ils aiment tant, en laissant le moins de traces possible.
Le lien
Notre amour de la verticalité serait-il complet s’il n’était pas partagé? En apnée comme en escalade, la longe nous relie à la corde ou au câble. Lien salvateur avec notre compagnon ou la surface. La cordée, aquatique ou terrestre, nécessite d’être à la fois présent pour soi et pour l’autre. Quoi de plus noble? L’un se repose entièrement sur l’autre, en alternance. Les moments de partages sont intenses et la plupart du temps authentiques : difficile de se cacher derrière un câble !
L'aventure
Aimer la verticalité, c’est aimer l’aventure. Petite ou grande, chacun à son échelle. Il y a toujours une part d’inconnu à escalader une montagne ou explorer les fonds marins. Une météo changeante, une erreur d’itinéraire, des courants forts. Adeptes de l’adaptation, vous y trouverez votre compte. Parti dans une voie plein sud un lendemain d’orage et la voie est quand même trempée? Poussez sur les pieds ou changez d’itinéraire. Parti en mer sans votre Mercalm? Revoyez à la baisse vos ambitions. Une chose est sûre, en montant ou en descendant, on ne s’ennuie jamais.
Alors voilà, pour toutes ces raisons et pour bien d’autres encore, j’aime la verticalité. Comme un besoin de prendre du recul, une nécessité de se rapprocher de la nature, de soi, et des autres. Le haut et le bas, pour ne pas être tout le temps sur une même ligne horizontale, et pour avant tout, se sentir vivant.